Dans la longue liste des personnalités aubussonnaises méconnues, il en est un qui me parait refléter une époque : celle de la colonisation mais aussi de la découverte et de l’étude de nouveaux territoires…
Achille Etienne FILLIAS est né le 25 mars 1820 à Aubusson. S’il est des explorateurs imaginaires nés de notre ville, tel Corcoran, Fillias est, lui, bien explorateur réel et je trouve bien incroyable, à une époque où l’on parle tant des relations franco-algériennes, de ne pas reconnaître ici le travail de Fillias.
L’acte de naissance d’Achille Fillias, à Aubusson.
Achille Fillias est le fils de Julien Fillias, ancien capitaine de ligne de l’Empire, marchand d’épices à Aubusson originaire d’Auzances.
En tant que fils d’Officier, il fait ses études au Prytanée de La Flèche (Lycée Militaire dans la Sarthe), puis à St-Cyr d’où il sort simple caporal à cause de son indiscipline. Démobilisé, il entre dans le service des mines (1841) où il est chargé par différentes compagnies de l’exploration des territoires algériens, c’est là qu’il va commencer la cartographie complète de ce territoire.
En 1848, il revient à Paris et se mêle aux milieux républicains et littéraires, successivement rédacteur de La Semaine et de La Réforme, journal fondé par victor Schoelcher, initiateur de l’abolition de l’esclavage en France et dans les colonies la même année.
Achille Fillias est, lui aussi, fondateur d’un éphémère journal, La Révolution.
A la même époque, il se lie avec l’auteur des Mystères de Paris, Eugène Sue, dont il devient le secrétaire et avec qui il écrit en collaboration un ouvrage paru sous le titre de « L’Amiral Levacher ». Le texte d’E. Sue, qui donne son titre à l’ouvrage, a paru dans La Semaine du 28 mars au 11 avril 1851, sous le titre primitif, Le Trousse-Diable. Il n’occupe que les 107 première pages du volume, les suivantes, 108 à 263, étant occupées par un texte d’Achille Fillias dans lequel on trouve une brève analyse des écrits d’E. Sue.
A la suite du coup d’Etat du 2 décembre, ses convictions républicaines le font éloigner temporairement de France. Il publie une Histoire de la Suède et de la Norvége. Sous son nom et sous celui de Ch. Besson, il écrit de nombreux articles dans La Science, L’Estafette, L’Echo du commerce, L’Europe artiste, etc…
En 1859, il regagne Alger et, pour postuler à un poste administratif alors qu’il a dépassé la limite d’âge, il modifie son acte de naissance, reçu d’Aubusson, pour se rajeunir. (Cette falsification le poursuivra dans tous les actes administratifs de son vivant, Carriat dans son dictionnaire le fait naître en 1821 ainsi que Pierre Urien qui pourtant révéle la falsification dans un Bulletin de l’Association Maurice Dayras.)
Alors qu’il est attaché à l’administration civile de l’Algérie, où il a à sa mort le grade de chef de bureau de première classe des Affaires civiles au Gouvernement général, il rédige plusieurs volumes d’histoire et de statistiques officielles sur cette colonie.
Dans un important ouvrage sur l’Histoire de la conquête (1860), qui vaut par l’abondance et la précision des renseignements, il ordonne la relation des faits selon les commandements successifs des divers généraux, se montrant d’autre part plein d’optimisme touchant la colonisation :
« Viennent les colons, et, avant un quart de siècle, l’Afrique, qui était sous les Romains le grenier de l’Empire, sera le grenier de la France » (L’Algérie ancienne et moderne, 1860).
Sa Géographie de l’Algérie (1862) qui connaît plusieurs rééditions et réadaptations et que l’on trouve encore parfois comme référence, est une monographie très complète qui présente la description physique, les divisions naturelles et culturales, les produits, la zoologie, les populations, les mœurs et coutumes, le commerce et l’industrie, l’administration et fournit à la fin une carte et un dictionnaire de toutes les localités.
Des sources diverses situent la mort d’Achille Fillias en 1881 ou 1885, elle n’a pas été transcrite à Aubusson (Oui, j’avoue que j’ai encore un peu de travail, trouver une photo d’Achille aussi… pas si simple visiblement)
Il est Chevalier de la Légion d’honneur.
Achille Fillias sur un dictionnaire norvégien (si quelqu’un peut traduire ?)
BIBLIOGRAPHIE :
— Etudes sur l’Algérie. Questions du jour. P., Challamel, 1849,
— Des mines et des minières d’Afrique, broch.
— L’Amiral Levacher. En coll. E. Sue. P., Permain. 1852, 2 vol. in-8, et Bruxelles-Leipzig,
— Suède et Norvège. P., G. Barba, « Panthéon pop. ill. », ill. Ch. Mettais (1857)
— Histoire de la conquête et de la colonisation de l’Algérie (1830-1860). P., A. de Vresse, 1860,
— L’Espagne et le Maroc en 1860. P., Poulet-Malassis et De Broize, 1860,
— L’Algérie ancienne et nouvelle. P., Dubuisson et Pagnerre, « Bibl. utile », 1860, 2e éd., 1875 ;
— Etat actuel de l’Algérie. Géographie physique et politique de l’Algérie. Description physique… populations, mœurs et coutumes, Dict. géogr. et hist. de toutes les localités. P., Hachette
— Alger, Tissier, 1862, in-J6, 292 p. ; Géogr. phys. et pol. de l’Algérie. Alger, Tissier, 1873,
— Géographie de l’Algérie, 3e éd.. P., Hachette, ; 4e éd., 1884 ; 5e éd., 1886 ; 6e éd. p. P. Joanne, 1888, réimp. en 1893, 1899. 1908 ;
— Nouveau guide général du voyageur en Algérie. P., Garnier, 1865,
— Dictionnaire des communes, villes et villages de l’Algérie… précédé d’une introd. Alger, Lavagne, 1878,
— Exp. univ. de Paris en 1878. Notice sur les forêts de l’Algérie, leur étendue, leurs essences, leurs produits. Alger, Gojosso, 1878,
— Notice sur les produits maritimes du littoral algérien. Alger, Cursaeh, 1878,
— L’Expédition de l’Oued Guir, 1870, récits militaires. Alger, Bouyer, 1880,
— Campagne du Maroc. Tanger, Issy, Mogador, 1844, récits militaires.
Sources : Dictionnaire Bio-Bibliographique Carriat, Pierre-Henri URIEN « Un compatriote méconnu : Etienne-Achille Fillias (1825-1885) » in Bulletin M.Dayras 1994, Jean-Pierre Galvan (qui prépare la publication de la correspondance d’Eugéne Sue) et Recherches personnelles
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