Pardoux Du Prat (Pradulphus Prateius)

Bien peu parmi nous connaissent Pardoux Du Prat, aubussonnais reconnu mais tombé dans l’oubli et n’ayant pas atteint la notoriété de Jules Sandeau ou Alfred Assolant, alors qu’il n’en est pas moins une des personnalités majeures d’Aubusson, un auteur prolifique de qualité et qui aurait du passer à la postérité au vue des ses travaux d’Humaniste… et pas seulement une reconnaissance de ses pairs dans sa spécialité de praticien de droit, même si de nos jours il n’est plus que cité que par les notaires et les érudits amateurs de questions philologiques.
Que savons réellement de lui ?

Né à Aubusson vers 1520, mort vers 1569.
Fils de Jean Du Prat marchand et de Marque Gerbault.
Elève de Jean Coras (conseiller au Parlement de Toulouse)
Défenseur du Calvinisme et contributeur à l’introduction de cette religion à Aubusson…

Bien maigre ces quelques lignes pour un Homme de cette envergure dont la traduction de ses écrits ont eu une influence bien au-delà de nos frontières et ce même après sa disparition.
Certes jurisconsulte, docteur en droit mais aussi latiniste érudit. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages de droit anciens, littéraires, ou sur la pratique notariale et juridique française.

Il est à l’origine de la publication des travaux d’Azo (Jurisconsulte. – Actif de 1190 à 1220) à Lyon en 1564, d’Alciati Andrea (Juriste et humaniste – 1492-1550), d’ Everardi Hadrianus Marius (Poète – 1509-1568) à Francfort en 1591…, des travaux de Nicolas, Jean de (de Gimont) imprimé en 1550 à Lyon dont Pardoux Du Prat sera l’auteur des commentaires de ces ouvrages…
A travers ses commentaires, Pardoux Du Prat ne se limite pas à de simples annotations mais si souvent ses définitions sont brèves, elles sont toujours concises, il lui arrive aussi de rédiger de longues notes d’une page ou plus.
En 1559, il publiera son 1er ouvrage « Jurisprudentia vetus. Draconis et Solonis leges, Pardulpho Prateio » (294 pages) dans la plus célèbre des six plus grandes maisons d’Edition qui domineront l’imprimerie Lyonnaise entre 1530 et 1560 celle de « Guillaume Rouillé » (pas seulement un imprimeur-libraire de Renommé mais aussi un habile commerçant (inventeur du petit format « sextodecimo »).
Il renouvellera l’expérience 2 ans plus tard pour « Jurisprudentiae mediae libri » (397 pages) toujours chez le même éditeur, il faut signaler que tous les ouvrages imprimés par Guillaume Rouillé étaient d’une grande qualité d’impression et avaient leur titre dans un bel encadrement gravé.

Chaque Editeur Lyonnais a sa marque :
Celle-ci est celle de G. Rouillé

En 1567, il publiera l’ouvrage qui sera son plus grand succès et le couronnement de sa carrière « LEXICON IVRIS CIVILIS ET CANONICI : SIVE POTIVS THESAVRVS, DE VERBORVM, QUAE AD IUS PERTINENT, SIGNIFICATIONE » fidèle au même éditeur lyonnais, l’ouvrage de Pardoux Du Prat sera une telle référence autant en France qu’à l’étranger qu’il connaîtra pas moins de 6 éditions sur une période de 15 ans.
(Editions: Lyon: 1567; Venise: 1572; Lyon: 1574; Francfort: 1576; Lyon: 1580; Frankfurt: 1581).

Le « Lexicon » est une véritable étude des concepts de Lois Romaines, de Lois Canons ainsi que quelques notions de Lois Grecques Antiques. Cet ouvrage fait autorité, se référant à des auteurs de dictionnaires juridiques tel Albericus de Rosate, Brisson, Spiegel et Oldendrop. Mais Du Prat ne fait pas st référence à des érudits juridiques mais aussi à des auteurs d’ouvrages médicaux ou littérataires, tant antique que contemporain, tels Homère, Galen et Cicéron.
Parsemé de citations grecques et prêtant une attention considérable aux questions philologiques, le « Lexicon Ivris » de De Duprat est considéré comme l’aboutissement du travail d’un humaniste juridique.

L’année précédente, devenu célèbre praticien docteur en droit, il sera l’annotateur officiel des Ordonnances du Roy Charles IX, faictes par sa maiesté en sa ville de Molins, en l’assemblée des Estats, l’an 1566. Pardoux Du Prat donna une première édition de ces ordonnances l’année même.
Ces ordonnances de Moulins qui furent rendues par une assemblée de notables réunie en Février 1566 sous l’initiative de Catherine de Médicis et de Michel de L’Hospital ont une place prépondérante dans l’Histoire de France car elles allaient régler la vie juridique Française jusqu’à la Révolution. De ce fait, elles connaîtront plusieurs éditions (1571 à 1573 puis 1580 et 1602…, à titre indicatif, l’édition de 1580 présente en annexe publiée par Benoît Rigaud Imprimeur Lyonnais se négocie entre 600 à 800 €uros), le nom de Pardoux Du Prat sera désormais lié historiquement à ces Ordonnances.

Célèbres Ordonnances du Roy Charles IX

En 1570, est imprimé chez la veuve Cotier l’ouvrage « L’Institution à la Vie Humaine » (Institution de la vie humaine, dressée par Marc Antonin… Remonstrance d’Agapetus, évesque, à l’empereur Justinian de l’office d’un empereur ou roy. Élégie de Solon,… sur le fait et vie des humains…) des Méditations de Marcus Aurelius Antoninus (Marc Aurèle Empereur Romain 121 – 180) et dont Peronnet Antoinette composera une Epître pour cet ouvrage et assurera la publication après la mort de Du Prat.

Consciente sûrement de l’importance historique du travail de traduction réalisé par Pardoux Du Prat… car les Méditations de Marcus Aurelius avaient disparu dans les limbes de l’Histoire vers le quatrième siècle et ce jusqu’au neuvième siècle. Les Méditations refont surface au dixième siècle dans les écrits d’un Evêque Byzantin qui aurait fait une copie de ce texte de grec ancien mais dont on ne revit plus le texte originel. C’est la copie du prélat qui sert depuis de source à toutes les autres… Une édition de « Les Méditations » à partir de cette copie a été d’abord imprimée à Zurich en 1558-1559 mais la toute première traduction dans une langue vernaculaire fut en Français et on l’a doit donc à Pardoux Du Prat.
Depuis 26 éditions des Ecrits de Marc Aurèle ont été publiée au 17ème siècle et 58 au 18ème siècle.
Pardoux Du Prat fut donc l’un des instigateurs du renouveau et de l’intérêt porté sur les Ecrits de Marc Aurèle au niveau européen.

Après son décès seront publiés en 1582 « Pratique de l’Art des Notaires » (contenant les formes de minuter et grossoyer toutes sortes de contracts tant ès matières ecclésiastiques que temporelles… avec un traicté de disposition judiciaire)

et « Théorique de l’Art des Notaires » (pour cognoistre la nature de tous contracts et tout ce qui concerne l’estat et office de notariat… adaptée aux ordonnances royaux). Le 2nd sera republié en 1589.

Concernant le Code Papyrien ou droit civil papyrien (recueil de Lois Royales faites par les Rois de Rome) dont il ne reste plus que quelques fragments répandus ici et là, divers auteurs ont essayer de les rassembler, Pardoux Du Prat a apporté sa pierre à l’édifice en transmettant six de ces lois.
Dans le domaine de la littérature, Pardoux Du Prat serait de ceux qui ont participé à la traduction des Centons (Jeu littéraire consistant à dérober des vers de Virgile et d’Homère pour raconter la vie du Christ ou un passage de la Bible) de Proba Falconia (Poétesse chrétienne, auteur d’un centon sur l’Ancien et le Nouveau Testament) qui serait à l’origine de cet exercice de style…

Ecrits de Proba Falconia

Aussi surprenant soit il aujourd’hui mais Pardoux Du Prat est un Homme qui a marqué son époque et qui a participé à faire l’Histoire… regrettable que cet homme illustre soit oublié de nos mémoires…
… et pourtant Pardoux Du Prat demeure une référence dans son domaine de prédilection, son ouvrage « Théorique de l’Art des Notaires » est réédité en 1974 en Suisse sous forme de Fac-similé et est cité en 2005 dans l’ouvrage « Production et usages de l’écrit juridique en France et au moyen âge à nos jours. »

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