En 1917 , Joseph G. Butler, industriel américain, fait un voyage en France avec une commission chargé d’évaluer les besoins en acier et fer pour l’armement suite à divers échanges franco-américains. Il en tire un livre publié à Cleveland par « the Penton press » et intitulé « A JOURNEY THROUGH FRANCE IN WAR TIME ». Visiblement, cet homme, de 77 ans à l’époque de son voyage, était sensible à l’art autant qu’à l’acier puisqu’en 1919, il fonde à Cleveland, le « Butler Institute of American Art America’s Museum » consacré à l’art américain à partir de sa propre collection. Y avait-il des tapisseries d’Aubusson dans cette collection ? A en juger par cet extrait de son livre, sûrement… en tout cas, sa journée passe par notre ville et sa courte description, trés américaine, est pleine d’informations.
LE TEXTE ORIGINAL tiré de « A JOURNEY THROUGH FRANCE IN WAR TIME » :
On Saturday, September 16Th, we arrived at Aubusson, the centre of tapestry industry of France, as it has been for the past five centuries.
Aubusson is located in a beautiful country. On our way to that city we noticed women attending sheep, just as we had seen in pictures by Millet and other painters. These women, with only a dog as companion, knit as they tend their flocks.
We arrived in Aubusson at 10:30 A. M. We were first taken to the town hall, where there was a general exhibit of the products of the district on view. I was greatly impressed with a portrait, in tapestry, of General Joffre, the great French commander, idolized by the French people and hero of the Battle of the Marne.
It did not occur to me at the moment of examining this tapestry portrait that it might be purchased; but afterwards, while we were at luncheon, I thought possibly it might be bought, and asked Monsieur Damour, who sat next to me, what he thought about it. He expressed the belief that it was not for sale and would not be permitted to go out of France. He said, however, that he would make an investigation, and sent his secretary, who came back in a very short time with the information that the portrait would be sold to an American only. The price was named and without any further negotiations I accepted the other, making only one condition, that it was not to be duplicated. I had the portrait taken from its frame and brought it with me, having it reframed upon my arrival home. It is certainly a beautiful pièce of work, as well as unique; no one but an expert could tell at first glance that it is not a portrait done in oil. It was copied by one of the greatest tapestry artists in France from the oil painting made of General Joffre by a noted French artist.
We visited a number of the manufactories owned by different corporations and individuals. I was personally impressed by one pièce of tapestry which had been in the making for a period of four years and would require at least one year longer to complete. It depicted the marriage of Napoleon and Josephine. This pièce is about thirty feet by twenty feet in size, and contains forty thousand shades of color. It was not for sale, and we were told it was to be held to take part in a celebration of the Allied victory in the Champs Elysees. The French people are so confident of victory that the Windows facing the Arc de Triomphe have already been engaged to view the event. We noticed there in the textile factories old women winding yarn, many of them eighty years of age, but still vigorous and hard at work. A photograph of a group of young girls was taken by one of the Commissioners and is reproduced in these pages.A little incident occurred at the luncheon before mentioned which is worthy of record. I noticed a course looking American Hag suspended in the dining room. I made inquiry of the woman who waited upon us at the table and she said that she had never seen an American flag, but had read about it and had reproduced what she thought was a copy from memory. It was made from a pièce of awning containing stripes, with blue stars sewn in. This waitress said she had worked at night on it and got as near as possible to her idea of an American flag. While it was not a work of art, it was a homely representation of the Stars and Stripes and a tribute from an humble citizen of France to America.
In our wanderings about Aubusson we came across an old man who said he was so old that he had forgotten his age. However, in a broken way, he told of having taken part in the Franco-Prussian war, and remembered having seen the great Napoleon. Inquiry made of some of the citizens revealed the fact that his age was supposed to be upwards of one hundred years. We visited a very old church with the distinction of having two bells which ring simultaneously. As we left this historic place it was an inspiring sight. Nearly the entirely populace was present and gave us any number of cheers as the military automobiles took their departure.
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LA TRADUCTION TRES APPROXIMATIVE (merci à Jean-Luc Mino pour la relecture rapide, si vous voyez des choses à rectifier, laissez un commentaire) :
Le Samedi 16 Septembre, nous sommes arrivés à Aubusson, le centre de l’industrie de tapisserie de la France, depuis les cinq derniers siècles. Aubusson est situé dans une belle région. Sur notre route vers cette ville, nous avons vu des femmes s’occuper des moutons, comme nous avions vu dans les peintures de Millet et d’autres peintres. Ces femmes, avec seulement un chien comme compagnon, tricotent tout en surveillant les bêtes.
Nous sommes arrivés à Aubusson à 10 heures 30. On nous a d’abord amené à l’hôtel de ville, où il y avait à voir une exposition des productions locales. J’ai été vraiment impressionné par un portrait en tapisserie du Général Joffre, le grand commandant français, adoré de beaucoup et héros de la bataille de la Marne. Ça ne m’est pas venu à l’esprit, à ce moment-là, d’examiner ce portrait en tapisserie en vue de l’acquérir ; mais après, alors que nous étions au déjeuner, j’ai pensé que probablement il pourrait être acheté, et j’ai demandé à Monsieur Damour, installé à côté de moi, ce qu’il pensait de cela. Il a exprimé la conviction qu’il n’était pas à vendre et ne serait pas autorisé à sortir de la France. Il a dit, cependant, qu’il ferait une recherche, et a envoyé son secrétaire, qui est revenu très rapidement avec l’information que le portrait serait vendu à un Américain seulement. Le prix a été demandé et sans toute autre négociation, j’ai accepté à la seule condition qu’elle ne devait pas être reproduite. J’ai fait défaire le portrait de son cadre et l’ai emporté pour le ré encadrer chez moi. C’est une pièce aussi belle qu’unique; seul un expert pourrait dire à première vue que ce n’est pas un portrait fait à l’huile. Il a été copié par un des plus grands artistes de tapisserie en France, à partir de la peinture à l’huile, faite du Général Joffre, par un artiste français remarquable.
Nous avons visité un certain nombre d’usines possédées par différentes sociétés et individus. J’ai été personnellement impressionné par une tapisserie sur laquelle on travaillait depuis quatre ans et qui exigerait encore au moins un an pour être finie. Elle dépeint le mariage de Napoléon et de Joséphine. Cette pièce fait environ trente pieds par vingt pieds et contient quarante mille nuances de couleurs. Elle n’était pas en vente et on nous a dit qu’elle était destinée à participer à une célébration de la victoire alliée sur les Champs-Elysées. Les français sont si confiants en la victoire que les fenêtres faisant face à l’arc de Triomphe ont déjà été réservées pour voir l’événement.
Nous avons remarqué dans les usines de tapisserie, les vieilles femmes enroulant le fil, bon nombre d’entre elles avaient quatre-vingts ans, mais étaient encore vigoureuses et dures au travail. Une photographie d’un groupe de jeunes filles a été prise par un des commissaires et est reproduite dans ces pages.
Un petit incident s’est produit lors du déjeuner, incident qu’il est intéressant de rapporter. J’ai remarqué ce qui semblait être une reproduction de drapeau américain suspendu dans la salle à manger. J’ai demandé à la femme qui nous servait à table et elle a dit qu’elle n’avait jamais vu un drapeau américain, mais avait eu connaissance de lui et avait reproduit ce qu’elle se rappelait de mémoire. Elle l’avait fait à partir d’un morceau de tenture à rayures, avec des étoiles bleues cousues dessus. Cette serveuse a dit qu’elle avait travaillé la nuit là-dessus et avait obtenu aussi près que possible son idée d’un drapeau américain. Ce n’était pas une oeuvre d’art, c’était une représentation simple des étoiles et des rayures et un hommage d’un humble citoyen de la France à l’Amérique.
Dans nos vagabondages à Aubusson, nous avons rencontré un vieil homme, par hasard, qui a dit qu’il était si vieux qu’il avait oublié son âge. Cependant, d’une voix cassée, il a raconté avoir participé à la guerre Franco-Prussienne, et s’être rappelé avoir vu le grand Napoléon. L’enquête faite auprès de certains des citoyens nous a révélé qu’il devait être âgé de plus de cent ans.
Nous avons visité une très vieille église qui avait la particularité d’avoir deux cloches qui sonnent simultanément. Quand nous sommes partis de cet endroit historique, c’était une vue trés inspirante. Presque toute la population était présente et nous a particulièrement acclamé quand les véhicules militaires ont pris leur départ.
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